Quand on pose à la mère du peintre Abdou Aziz Seck cette question, alors que sa maison s’effrite jour après jour sous l’assaut des vagues : « Une exposition de tableaux pour résoudre le problème des pêcheurs et des habitants de Mbao, ça ne vous fait pas sourire ? », sa réponse ne se fait guère attendre. « Le fait qu’Abdou Aziz soit un artiste peintre, est mal vu pour certains habitants de Mbao. On parle du n’importe quoi sur lui. Son métier d’artiste est étranger à cette communauté, et pour eux, c’est le métier des paresseux qui ne veulent pas braver la mer. Mais, heureusement, moi qui suis sa mère et qui l’ai mis au monde, je le comprends sur son choix. Bien sûr, j’avais douté dans un premier temps lorsqu’il abandonnait  la pirogue familiale pour son art, mais ses études à l’école des beaux-arts de Dakar m’avaient ensuite rassuré. Je suis optimiste. » Ces propos datent de mars 2015. Depuis lors, la situation s’est dégradée à Mbao, suite à des pluies diluviennes qui se sont abattues sur la ville en septembre 2015. Mor Talla Ndione témoigne : « Depuis avant-hier, je filmais Mbao, la mer a frappé sévèrement et c’est une véritable tragédie. La plupart des familles sont délogées. Et cela a affecté une partie de la maison familiale d’Abdou Aziz Seck. C’est vraiment triste et bouleversant pour toutes ces familles trop pauvres… c’est presque incomparable, les images du village d’avant et celles d’aujourd’hui totalement en ruines. On dirait la fin des temps. Je filmais même en pleurant et c’était vraiment triste de voir Abdou Aziz Seck au milieu de tout ça. »

Face à la réalité des faits, la question posée au début quant à l’efficacité d’un pinceau pour subvenir aux besoins de sa famille confrontée aux pires circonstances, cherche une réponse qui ne vient pas. Faut-il recommencer à zéro les tâches déjà entreprises pour ce film : scénario, décors, accessoires, et autres, afin de les adapter aux nouvelles circonstances ? Faut-il abandonner toute approche artistique face à l’urgence, et faire appel à des réponses plus adéquates ?

Il paraît plus que jamais illusoire, utopique, voire complètement fou, de penser qu’un simple pinceau de peintre puisse résoudre la question d’une érosion côtière. C’est justement parce que cela semble improbable que l’idée de ce film reste intéressante.